Résumé :
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Vice, maladie de l'âme et du corps, de nature mélancolique, simple défaillance humaine, état de crise ou usure lancinante, l'acédie est un concept et une réalité de la vie monastique polysémique isotopant et axiologique, tant il génère de sens, induit un vocabulaire touffu et se comprend comme un malheur de tout l'être minant la paix du cloître et de la cellule. Insaisissable, l'akèdia définie pour la première fois par Evagre le Pontique (IVe siècle) comme " le démon de la méridiène ", " le démon de midi " de l'anachorète, échappe à la glose de la plupart des dictionnaires et des commentateurs qui l'ignorent bien souvent sous cette forme lexicale pour lui préférer les termes plus appropriés de " manque d'ardeur, dégoût, ennui, tiédeur, torpeur, paresse, mélancolie " ou lui associer des co-occurrents qui viennent en revitaliser le sens, tel Cassien (IVe-Ve siècle) qui fait de l'acédie le sixième vice de son octonaire, emprunté à Evagre le Pontique, précédé par la tristesse. Ce dernier terme auquel on relie souvent l'acédie pour éclairer son sens demeuré énigmatique, quand on ne réduit pas purement et simplement son contenu à la tristesse, comme le fera Grégoire le Grand (VIe-VIIe siècle), indique que sur l'échelle de la perfection monastique, où se gravissent pas à pas les degrés des vertus, l'acédie surgit comme une atteinte à la fidélité à la vocation et à la ferveur de la prière qui a pour conséquence la distraction de l'esprit, la morosité et le désir de fuir le cloître, la cellule. Tels sont les symptômes et les manifestations de l'acédie que nous analyserons au cours de ce colloque ainsi que les remèdes appropriés qui lui ont été appliqués, à travers la tradition des Pères du désert et le propositum érémitique de l'Ordre des chartreux.
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