« Je suis parce que tu me regardes. » Croire, c'est voir. La vision humaine est retenue par des formes, des figures et des images. Mais elle y saisit l'essence d'une présence. Par-delà le sensible, par-delà le visible, dans l'obscurité d'un insondable mystère, l'oeil de l'esprit se tourne vers Dieu dont il rencontre le regard paternel, vigilant. Cette source de vie lui est d'abord révélée par l'image peinte d'un visage au regard omnivoyant : remarquable démonstration du pouvoir de la peinture dans la découverte de la vérité de la foi ! Unique, le regard divin concilie les opposés ; absolu, il abolit les limites de la perception humaine ; éternel, il désigne l'au-delà de la coïncidence des contraires. Par l'Unité de la Trinité, la filiation de l'homme avec Dieu consacre l'indéfectible lien de l'amour aimant et de l'amour aimé en l'ultime ravissement de l'esprit dans le Verbe divin. La voix s'accorde à l'image et le « parler » au « voir » : leur étonnante articulation ne peut qu'éclairer notre intelligence du langage et de la peinture dans leur rapport avec la croyance, Ecrit en 1453 par l'auteur de La Docte ignorance (1440), Le Tableau ou la vision de Dieu nous communique mieux que tout autre texte la pensée incandescente d'un philosophe capable de renouveler notre regard. De nous rendre la grâce de l'étonnement.
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